La crise sanitaire que nous traversons depuis plusieurs mois est venue précipiter les transformations de nos manières d’habiter. Le télétravail rendu quasi obligatoire et le temps accru passé chez soi sont de nouveaux indicateurs qui nous invitent sérieusement à trouver une nouvelle organisation spatiale, à repenser l’agencement de nos maisons pour laisser cohabiter vie familiale, sociale et professionnelle. Et si finalement tout cela s’installait durablement et qu’il y avait là une vraie mutation à engager dans l’organisation de nos maisons ?
Tout le monde n’a pas la chance d’avoir un bureau chez soi et bien à soi. Ou un espace ressource dans sa maison, dans lequel s’isoler. La situation se complexifie pour les plus mal logés qui travaillent dans des conditions peu adaptées : positionnement du corps qui amène à des tensions, enfants à la maison, vas et viens familiaux, aménagements sommaires non adaptés… Nous faisons face à un grand défi de transformer ces espaces personnels en espaces mixtes.
Souvent le partage de l’espace au sein de la maison, donne lieu à des ras le bol voire parfois à des situations comiques. Nombreux sont ceux qui se sentent perdus et m’avouent ne plus savoir où sont les frontières, frontières qui étaient jusqu’à présent très hermétiques entre les différents secteurs de vie .
Faut-il continuer à sectoriser de façon à ce que les parois soient si étanches que ce soit si douloureux quand on essaie de les bouger ? Ou s’acheminer vers plus de flexibilité y compris au sein de nos maisons en agençant l’espace de manière intelligente et souple.
Il a été observé lors du 1er confinement, que les gens se sont engagés à faire du tri chez eux, comme un vrai besoin de faire de la place et de se réapproprier leur espace intérieur, d’harmoniser la relation qui existent entre le corps physique, le corps familial et la maison. Comme pour laisser de la place à tous ces corps qui doivent désormais cohabiter habilement.
La société nous pousse à consommer, à accumuler des objets inutiles, à posséder sans plus y faire attention.
« Le chez soi est un dialogue entre l’être et l’avoir , la situation actuelle remet en lumière la question de l’être que l’on avait un peu négligée » .Pascal DRYER
La question de l’être est centrale dans notre relation à la maison. Mais c’est comme si elle disparaissait car le se loger à pris le dessus sur habiter.
Et si cette crise permettait de faire apparaitre l’entièreté de l’être dans toutes ses dimensions ? Et s’il n’était plus nécessaire d’être morcelé ? Et si elle nous offrait la possibilité de laisser vivre une identité pleine et entière qui abriterait travail, famille, lien social ? Comme une unification de qui nous sommes. Ceci en repensant intelligemment notre manière d’habiter, à la manière d’Eidegger et de Paquot : comme notre capacité d’être présent au monde. Avoir été coupé en quelque sorte du lien social dans lequel nous projetions notre extériorité, nous invite à repenser notre intériorité ainsi que l’agencement et l’évolution au sein de nos propres habitations. En un mot, tendre vers du flexi-housing.
Le logement flexible est un logement qui s’adapte aux besoins changeants de l’utilisateur et aux nouvelles technologies à mesure qu’elles émergent. Mais au-delà de la transmutation de nos maisons du point de vue habitationel et fonctionnel, il s’agit bien de comprendre le flexi-housing comme une manière d’être chez soi qui laissera cohabiter avec souplesse nos vies riches et denses.
Le flexi-housing fait la part belle à l’agencement, l’aménagement, la décoration, le zoning, etc … C’est essentiel, en effet, mais pas que ! Pour autant je suis convaincue que cela doit s’accompagner d’une démarche de transformation personnelle, pour réconcilier les différentes facettes de nos existences et enfin reconquérir son propre espace intérieur.
A suivre …